

Éditions : Paris, Collection Georges Barda
Année : 1864
Pages : 329 P.
Fronsac rentre dans la lice galante. — La gageure. — Les loups dans la bergerie.
— L'aide de camp de Villars dans le ménage du maréchal. - Eugène et Villars à Rastadt. - La médaille. - L'amour tenant une plume. — Question financière. — Mort du duc de Berry. — Le flacon recouvert de maroquin. - Nouvelles calomnies contre le duc d'Orléans. — M. de Chalais archer. - Le moine prisonnier. — Les princes légitimés appelés à la couronne. - Inductions tirées de cette disposition. — Pontchartrain refuse de sceller l'édit. - Les sceaux sont remis à Voisin. — Le comte de Toulouse; son portrait. - Testament du roi. — Harangue de Sa Majesté. — Le testament du roi placé dans la muraille d'une tour du palais. — M. du Maine et la régence; le chat et l'oiseau. — Conférences nocturnes d'Anne et de Jacques III. - Mort de la reine Anne. -Georges ler lui succède. — Les promenades du cours à minuit.
— La chasse aux belles. — Fières paroles et soumission effective. - Traité de Baden. — Siège de Barcelone; tableau. - Fronsac et la blonde miroitière.
- Madame Renaud. — La nuit coupée. — Scène matinale. - Coup de théâtre pittoresque. — La petite maison. — Trio. — Le livre et l'épingle. - Le point de vue du cabinet. — Tardif amour de Louis XIV pour ses sujets. — Le peuple gros et gras. — La bulle Unigenitus. - Xerxès de Crébillon. - Les morts et les blessés. — La vengeance ignorée du vengeur. - Mort de Marie-Louise, reine d'Espagne. — Le duc de Beauvilliers. - Réminiscence sur le maréchal ferrant de Salon.
On a dit que l'amour était le frère de la guerre, cette définition me semble trop absolue; peut-être devrait-on se borner à dire que la beauté se trouve souvent parmi les dépouilles des vaincus, et ce n'est point alors l'amour qui devient son vainqueur : c'est le plaisir. Mais ce sentiment plus délicat où les sens empruntent au moins quelque temps le langage de l'âme, on ne s'y livre avec délices qu'au sein de la paix. Les soupirs, qui sont son éloquence, ne peuvent s'allier avec la fureur des guerriers; il faut à ce sentiment le silence mystérieux du boudoir, l'obscurité protectrice de l'alcôve parfumée, ou l'ombrage des bosquets fleuris. Nos galants seigneurs ont trouvé tout cela à leur retour de l'armée, avec des essaims de beautés nouvelles; nouvelles, que ce mot a de puissance! son charme suffit pour dissiper ce que sept, huit ou dix ans ont mêlé de froideur à la galanterie de nos belliqueux courtisans. Mais ce que le temps leur a fait perdre, il l'a fait gagner au duc de Fronsac: ses amours, avant la bataille de Denain, n'étaient qu'un enfantillage animé des feux d'une jeunesse débutante, prodiguant à tort et à travers les trésors d'un bonheur qu'elle croyait inépuisable. Deux ans ont bien formé cet enfant: muni de plus de richesses encore à son retour qu'il n'en possédait à son départ (on comprend de quelles richesses je veux parler), il en sait mieux régler l'usage; il est tout au plus généreux en amour lorsque son amour-propre s'attache à prouver qu'il est prodigue. L'indiscrétion extrême de Fronsac ne se borne pas à divulguer ses bonnes fortunes : elle y ajoute des conquêtes qu'il n'a point faites, c'est-à-dire qu'il n'a pas encore eu le temps de faire, car je suis forcée d'avouer, après y avoir mûrement réfléchi, que je ne vois à la cour aucune vertu assez robuste pour résister aux attaques de ce petit conquérant. C'est ainsi que sa vanité, se montrant plus ambitieuse encore que sa galanterie, lui fait envoyer le soir son carrosse armorié, non-seulement à la porte d'une femme chez laquelle il ne se trouve point en ce moment, mais quelquefois près d'un hôtel où il veut aux yeux de ses amis se donner une maîtresse qu'il n'a pas.
Aussi le fils de M. de Richelieu pourrait-il à lui seul alimenter la chronique scandaleuse, jamais personne ne montra plus de variété dans un genre d'aventures où tous les aventuriers se dirigent vers le même but. Si Molière vivait encore, Fronsac lui fournirait une mine féconde d'intrigues amoureuses assorties d'une multitude de folies inédites. Je ne me propose point de suivre ce jeune seigneur dans les innombrables ramifications de sa carrière galante, je craindrais que la mobilité de mon style ne pût répondre à celle de ses expéditions... Je choisirai.
Une marquise que notre jeune roué n'a pu jusqu'à ce jour compromettre assez pour que son nom soit divulgué, fut trouvée il !" quelques jours sur les genoux de Fronsac par un mari bénévole. Le désordre, quoique peu apparent au premier coup d'œil, était cependant presque complet, et la dame jeta un grand cri.