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Éditeurs : LeGrand, Troussel et Pomey, Libraires
Année : Inconnue
Pages : 536 P.
DEPUIS L'OUVERTURE DES ÉTATS GÉNÉRAUX JUSQU'A LA PIN DE L'EMPIRE
D'APRES DULAURE DEPUIS LA RESTAURATION DE 1814 JUSQU'AU 10 DÉCEMBRE 1848 PAR PAUL LACROIT (BIBLIOPHILE JACOB )
DEPUIS L'ÉLECTION DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE JUSQU'A LA PIN DE LA GUERRE D'ITALIE 1860
PAR M. E.-F. D., ARCHIVISTE PALÉOGRAPHE.
Tome Sixième
Le gouvernement de Louis-Philippe était d'accord avec le gouvernement anglais sur les plus délicates questions de la politique étrangère. Ils voulaient l'un et l'autre l'indépendance de l'empire ottoman, la sécurité des populations chrétiennes de la Syrie, la liberté d'action de la nation espagnole, et la souveraineté de la reine Isabelle Il. Le droit de visite servait de lien, pour ainsi dire; à l'union des deux gouvernements. Le discours de la couronne, prononcé le 9 janvier 1843, à l'ouverture de la session, exprimait en quelques phrases cette entente cordiale, qui souleva de nouveau, ainsi qu'elle l'avait fait l'année précédente, une bourrasque anti-anglaise dans les deux chambres. On considéra le droit de visite non-seulement comme humiliant notre pavillon et aliénant au profit de l'Angleterre la dignité de la France, mais encore comme préjudiciable à notre marine marchande. Guizot, après avoir représenté notre situation extérieure sous un aspect favorable et moral, essaya de démontrer l'exagération des reproches adressés au cabinet; mais la chambre n'en formula pas moins, dans l'adresse, un blâme sévère contre les négociations entamées et contre les derniers traités. Quand, de la discussion de l'adresse, on eut passé à la discussion des fonds secrets, les attaques contre le cabinet se renouvelèrent avec plus de violence, et franchirent les limites de la polémique constitutionnelle. Examinant les actes des ministres qui s'étaient succédé au pouvoir depuis la révolution de juillet, et les frappant tous des mêmes stigmates, l'impétueux Ledru-Rollin déclara qu'il ne jugeait pas les personnes, mais la continuité, l'immuabilité d'un système, et qu'il ne voyait aucune utilité à changer le cabinet si les principes devaient rester toujours les mêmes. Renchérissant sur Ledru-Rollin, un autre orateur de l'extrême gauche, Joly, exposa le tableau de la politique invariable adoptée pendant treize années consécutives, et conclut, de cette exposition des faits, que le gouvernement parlementaire n'était plus qu'un mensonge, du moment que le cabinet cessait d'être l'expression de la majorité; du moment que, sur les ruines de vingt-deux ministères, une pensée systématique demeurait obstinément debout; et qu'au lieu de gouverner, le cabinet obéissait et subissait une influence tyrannique émanée du trône.
Voilà quel était le langage de l'extrême gauche, qui faisait remonter jusqu'au roi les coups terribles qu'elle portait aux ministres. Non moins hostile au ministère et beaucoup plus dangereux pour lui, car il avait acquis de chaque côté de la chambre des racines cachées, le tiers parti se détachait nettement du cabinet, parce que l'heure lui semblait venue d'examiner si des réformes sages, modérées, prudentes, ne devenaient pas nécessaires; parce qu'il pensait que, sous l'empire des circonstances, les ministres, au lieu de se tenir dans le cercle étroit de la majorité ordinaire, devaient le franchir et offrir de nouveaux gages de réconciliation à de nouveaux auxiliaires. Dufaure et Passy, qui s'exprimaient de la sorte, marchaient à la tête du tiers parti.